Immobiliare : Promotion et Construction Immobilière Côte d’Ivoire

Mathieu N’Dri Koffi partage son évaluation du secteur immobilier en Côte d’Ivoire et des différents défis à surmonter dans ce domaine. Il présente également Immobiliare, une société spécialisée dans les activités suivantes : promotion et construction immobilière, aménagement foncier, construction de châteaux d’eau, adduction d’eau potable, électrification villageoise et voiries et réseaux divers (VRD).

Interview avec Mathieu N’Dri Koffi, Administrateur Général d’Immobiliare

Mathieu Koffi N'Dri, Administrateur Général d'Immobiliare

Pourriez-vous décrire la situation actuelle du secteur immobilier en Côte d’Ivoire ?

Il faut noter qu’en Côte d’Ivoire, notamment à Abidjan, le besoin en logements est très important. Ce phénomène s’étend même au-delà d’Abidjan. Récemment, j’étais en mission avec mon directeur technique et deux partenaires venus de France, dans la zone de Dimbokro, à 200/300km d’ici. C’est une ville qui voit ses fonctionnaires et ses enseignants partir parce qu’il n’y a pas assez de logements. La Côte d’Ivoire en a un besoin important, à hauteur de 400.000 par an. Nous n’en produisons même pas le quart, toutes sociétés confondues.

Des moyens de financement existent, à deux niveaux. Tout d’abord au niveau des prêts, c’est-à-dire l’argent que nous recherchons pour nos promoteurs afin de construire des maisons. La politique ici permet à chaque Ivoirien engagé dans une grande société de trouver un financement pour s’acheter une maison. La seule difficulté que nous rencontrons est que les terrains existent, mais qu’ils coutent cher. Dans le district d’Abidjan par exemple, le terrain le plus cher lorsqu’il est villageois, ne peut pas dépasser deux mille francs. Mais aujourd’hui nous sommes obligés de les acquérir à dix mille ou quinze mille francs le mètre carré. Cela pénalise l’acquéreur, alors que le pouvoir d’achat n’avance pas à la même allure malgré la croissance. Le gouvernement ivoirien doit prendre le taureau par les cornes. Auparavant, on pouvait se retrouver avec deux ou trois titres fonciers sur le même terrain, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Il faut que le gouvernement prenne ses responsabilités, et encadre la vente de terrains. Quand il l’aura fait, on assistera à une baisse des prix, et ce de façon substantielle. Mais toujours est-il que combler le déficit va nécessiter du temps et beaucoup de volonté.

C’est un problème qui date… Pourquoi le gouvernement ne l’a t’il pas déjà résolu ?

Les villageois sont sur le terrain. L’Etat leur dit qu’il possède le terrain, alors qu’eux pensent que le terrain leur appartient. Dès lors, ils tiennent à en fixer le prix. Avec l’arrivée du nouveau ministre, il faudrait que l’Etat approche les villageois de façon à ce qu’un prix soit fixé. En tant qu’aménageur, le gouvernement nous a octroyé de taxer le terrain. Nous avons commencé le décapage, nous nous sommes installés, et nous avons déjà investi pas mal de millions, mais nous ne pouvons plus poursuivre parce que les villageois s’y opposent. Ils ont porté l’affaire devant les tribunaux et ces derniers leur ont donné raison. Dans un état de droit, lorsque le tribunal donne raison à une partie, elle en jouit. Mais qui est le véritable détenteur du droit coutumier ? S’il s’agit du gouvernement, alors il doit se donner le moyen de fixer des prix, et de faire en sorte qu’ils soient respectés. Sinon il faut entrer en négociations avec les villageois pour qu’un prix soit arrêté.

Quels sont les secteurs les plus porteurs pour votre entreprise ?

Nous faisons de la promotion immobilière, ce qui représente 85% de notre chiffre d’affaires. Nous faisons également de l’aménagement foncier et nous intervenons auprès de certaines sociétés qui favorisent l’accès à l’eau potable, ou construisent des logements pour les ouvriers, par exemple.

Quels sont vos avantages compétitif ? Pourquoi un promoteur devrait-il vous choisir ?

Jusqu’à très récemment, nous ne faisions pas de publicité. Depuis l’acquisition de la certification ISO, on nous demande d’en faire. Si nous sommes choisis, d’une part, c’est parce que nos prix font partie des moins chers, tout en proposant des produits de qualité. Les maisons que nous construisons pour nos acquéreurs sont construites comme les nôtres. D’autre part, il y a aussi l’avantage de la superficie que nous offrons, tant au niveau des terrains qu’au niveau des constructions. C’est ce qui fait que nous sommes énormément sollicités. Et puis le bouche à oreille est un facteur qui joue en notre faveur. Ce que nous faisons est très bon, en comparaison aux promoteurs concurrentiels.

Vous avez parlé de certification. Quels en sont les avantages ? Pourquoi est-ce si important ?

Avec la certification, il y a des règles établies qui doivent être suivies par nos différents départements. Les maisons étant particulièrement chères, le client, par la certification, cherche la crédibilité et le respect des normes. Quelques jours après la publication de notre certification, nous avons reçu de nombreux appels. Il est évident que lorsque vous participez à un appel d’offre et que vous possédez la certification ISO, vous n’êtes pas regardé de la même façon que quelqu’un qui ne l’a pas. Il en est de même avec nos partenaires. Il s’agit d’un gage de sérieux et de crédibilité. Je m’évertue dès que possible de dire à mes collaborateurs que cette certification peut nous être retirée du jour au lendemain si les choses ne fonctionnent pas correctement. Nous avons d’ailleurs créé un poste de conseiller chargé de suivre la certification ISO et nous travaillons avec un cabinet situé à Besançon qui nous encadre afin d’aller de l’avant. Cette certification nous est bénéfique.

Le fait de posséder cette certification amène à une sorte de formalisme qui intéresse toujours les investisseurs et les partenaires potentiels. Avez-vous un intérêt ?

Nous faisons de la promotion immobilière, ce qui représente 85% de notre chiffre d’affaires. Nous faisons également de l’aménagement foncier et nous intervenons auprès de certaines sociétés qui favorisent l’accès à l’eau potable, ou construisent des logements pour les ouvriers, par exemple.

Le partenariat nous intéresse, tout dépend de la constitution dudit partenariat. Nous sommes intéressés par les partenaires portant sur les projets. Nous ne redoutons pas l’entrée de partenaire dans le capital, mais la gestion d’une entreprise en France ou en Europe n’est pas tout à fait la même qu’ici. Lorsque vous demandez un document administratif en France, il faut suivre une procédure. Ici, si vous ne suivez pas l’avancée d’un dossier vous-même, il y a de grandes chances qu’il disparaisse. Nous utilisons d’ailleurs l’expression « mettre un caillou là-dessus » lorsque l’on parle de ce genre de suivi. Nous sommes dans l’obligation de composer avec ces pratiques afin de pouvoir avancer. Par exemple, un document est nécessaire pour votre projet, vous êtes dans l’urgence car votre demande n’est toujours pas prise en compte après plusieurs mois, quelqu’un vous dit alors qu’il est possible d’obtenir ledit document, moyennant quelques arrangements. Les partenaires ne comprennent pas ce type de situation. Il n’existe pas de facturation concernant ces arrangements.

Y-a-t-il des possibilités d’association de projets ?

Pour les projets, oui. On définit le contenu du projet ainsi que nos attentes. On investit dix mille francs, on va en sortir quinze mille, le bénéfice est de cinq milles, environ quatre mille ou trois mille cinq cents après le paiement des impôts, tout est donc très clair dès le départ.

Quel genre de projet ? Que proposez-vous à un investisseur étranger qui est dans l’immobilier et qui veut s’associer avec une entreprise locale qui connait le marché ?

Nous avons différent projets, nous pouvons demander à tel partenaire de venir nous aider à les financer, et les marges sont estimées à l’avance. Il est également possible d’acheter un terrain, de l’aménager, puis de le vendre. Cela prend du temps, et il faut être clair concernant le retour sur investissement auprès des partenaires. Si ils peuvent attendre deux ou trois ans, alors autant se diriger sur un programme immobilier, mais s’ils peuvent attendre cinq ou six ans, il est à ce moment possible de faire de l’aménagement foncier et de spéculer. J’ai acheté un hôtel il y a une dizaine d’année pour six millions de francs. On me propose aujourd’hui d’acheter cet espace à cent-trente millions. Les partenaires doivent donc être patients.

L’investissement foncier s’avère donc être très intéressant ?

Oui, car l’Etat est débordé et a totalement abandonné. Aujourd’hui, les réseaux primaires n’existent plus. C’est-à-dire que même quand l’Etat décide de faire des efforts, il ne va pas au bout des choses. Il fera la voirie, il fera suivre l’électricité et l’eau, mais il ne s’occupera pas des eaux usées par exemple. Aujourd’hui si quelqu’un arrive à trouver un partenaire qui tient à rester dans ce domaine-là, c’est-à-dire aménager de bout en bout, l’Etat le soutiendra.

Nous entrevoyons actuellement un autre volet : l’énergie solaire. L’énergie pompe le budget des ménages, alors que dans des zones comme celle de Dimbokro, le soleil est extrêmement généreux. Nous souhaitons être les pionniers de l’utilisation de cette énergie, et l’associer à la réalisation de nos programmes immobiliers.

Actuellement, l’une de nos contraintes dans ce pays est le prix des maisons. Nous cherchons à utiliser de nouvelles techniques afin de le faire baisser. Remplacer par exemple le ciment par le BTC (briques en terre cuite). Plusieurs maisons ont été construites avec ce matériau, ce qui nous permet de maîtriser les coûts. D’après les études de nos architectes partenaires, il est possible d’économiser jusqu’à 35%. Il est donc important de voir quels sont les fonds qu’il nous sera possible de solliciter concernant l’énergie solaire. Nous irons très prochainement au Kenya, où il existe le fond GARI, qui finance les énergies renouvelables.

Quelles sont vos priorités du moment ?

Avoir la possibilité de travailler en toute sérénité. S’assurer d’avoir des terrains sécurisés et en abondance. Nous mettons un point d’honneur à ce que nos financiers puissent nous suivre à tout moment. Cela implique une bonne gestion. Les délais sur nos sites doivent être tenus. Et enfin la priorité de satisfaire nos clients.

Le respect des délais est plutôt rare dans l’immobilier ?

Dans notre milieu, lorsque les délais ne sont pas respectés, il s’agit la plupart du temps d’un problème de financement. Avec le système actuel, une maison de quatre pièces est généralement construite en un mois et demi. Il est donc facile de se projeter. Lorsque l’argent est à notre disposition, il est impératif de terminer le projet et de tenir les délais.

Comment voyez-vous Immobiliare dans trois ans ?

J’ai répondu à une question similaire il y a deux ans à La Rochelle. A l’époque notre chiffre d’affaires s’élevait aux alentours de trois millions d’euros. J’avais alors répondu en disant que dans deux ans j’aimerais en atteindre cinq, et dans huit ans dix. Nous avons dépassé ces objectifs deux ans après cette interview. A moyen terme, nous désirons que notre certification ISO demeure, et posséder une bonne part du marché. Ce qui suppose de posséder nos matières premières, les terrains, et des ressources avec nos partenaires, tant au niveau local qu’international.

Mais notre principale mission aujourd’hui, c’est de faire partie des premiers à proposer des solutions quant à l’apport de nouveaux matériaux et à l’utilisation d’énergies renouvelables, afin de faire baisser les prix. Nous voulons être les pionniers. En couplant ces données, nous rendrons service à la Côte d’Ivoire, avec des prix plus bas et un nombre plus important de logements. Le gouvernement pourra alors s’attaquer à d’autres priorités.

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