Librairie de France, Barnoin Informatique et Burotop : Présentation de LDF Groupe

René Yedieti présente Librairie de France Groupe, une structure présente dans différents secteurs en Côte d’Ivoire tels que : la librairie, la papeterie, l’informatique, ou encore les solutions bureautique et multimédia. LDF Groupe se décline en trois enseignes : Librairie de France, Barnoin Informatique et Burotop.

Interview avec René Yedieti, PDG de Librairie de France Groupe

René Yedieti, PDG de Librairie de France Groupe

Pouvez-vous dresser un tableau de votre secteur en Côte d’Ivoire ?

Notre groupe couvre trois gros secteurs. Dans le premier secteur, la librairie, nous sommes de loin leader sur le marché ivoirien, mais le secteur lui-même se porte assez mal. Le livre est une denrée rare en Côte d’Ivoire, les points de vente sont peu nombreux. On en trouve quelques-uns à Abidjan, mais à l’intérieur du pays, ils sont presque inexistants. Le secteur est avalé en grande partie par l’informel qui entraîne piraterie et une absence de sélection. Il faut donc entièrement refonder la politique de ce secteur. Nous travaillons pour cela avec le Ministère de la Culture, afin d’aboutir à une nouvelle législation. L’activité d’un bon libraire en Côte d’Ivoire est composée à 60-70 % de vente de livres scolaires et parascolaires et est caractérisée par une forte saisonnalité. Le deuxième secteur est représenté par la papeterie et les fournitures de bureau, un secteur qui mérite aussi d’être réorganisé, en particulier en ce qui concerne la réglementation sur la qualité des produits arrivant sur le marché. L’informel y est aussi très présent, ce qui entraîne entre autre des pertes de ressources fiscales et un déficit d’emplois réguliers. Enfin, le secteur informatique est en pleine croissance. L’activité porte tout d’abord sur le matériel : ordinateurs, tablettes et tous les accessoires complémentaires. L’État a mis en place il y a un an une réglementation réduisant les droits de douanes sur les matériels informatiques, ce qui permet aujourd’hui d’assainir le milieu et de mettre fin à la fraude. Dans le domaine du logiciel, la Côte d’Ivoire dispose de grandes entreprises, comme l’enseigne LDF Groupe Barnoin Informatique, qui a de réelles compétences. Le pays envoie même des informaticiens vers la sous-région et au-delà. La formation acquise dans les écoles est complétée par des formations extérieures auxquelles s’ouvrent les entreprises. Les ingénieurs ivoiriens disposent alors de connaissances de niveau international, comparables à celles des ingénieurs Oracle ou HP. Ils intéressent donc les grandes entreprises à échelle mondiale. Nous récoltons aujourd’hui les résultats de notre investissement.

Quelle est votre stratégie pour les secteurs de la librairie et de la papeterie ?

Ils ne représentent pas une priorité de développement mais se situent toujours dans la continuité de notre stratégie. Notre slogan est assez explicite : « Offrir les instruments du savoir à la Côte d’Ivoire ». À travers notre réseau, nous souhaitons rapprocher le livre du lecteur-consommateur par l’ouverture de points de vente, de taille adaptée à l’environnement, sur une grande partie du territoire. Nous disposons aujourd’hui de dix magasins, six sont situés à Abidjan et quatre à l’intérieur du pays. Pour notre développement, nous privilégions Yamoussoukro, Bouaké, San Pedro et ouvrirons éventuellement des petites franchises dans d’autres villes. La couverture de l’intérieur du pays est très faible, les librairies dignes de ce nom y sont inexistantes malgré la présence d’écoles et d’universités, ce qui représente un handicap important. Nous souhaitons donc progressivement combler ce déficit, car la demande est bien présente.

Comment comptez-vous vous y prendre ? Envisagez-vous de vous tourner vers Internet ?

Pour ce faire, nous allons ouvrir des points de vente physiques. La vente par Internet ne constitue pas une option pour le moment, car elle suppose de la part de notre clientèle la possession d’un outil informatique, d’une bonne connexion et d’une carte de crédit. Or les clients que nous ciblons ne disposent pas toujours de ces instruments et ces habitudes ne sont pas encore ancrées dans leur quotidien. De plus, l’informel tente de pallier l’absence de points de vente formels. Il est donc bien nécessaire de développer une offre sur le terrain pour mettre fin à l’informel et capter la clientèle que forment les étudiants, les élèves, les professeurs et les fonctionnaires. Une fois que l’offre via les points de vente et les pratiques des lecteurs seront bien implantées, nous pourrons passer à Internet et à la vente en ligne.

Toujours dans ces mêmes secteurs, vous êtes actuellement confrontés à l’arrivée d’un concurrent, la FNAC, qui a déjà ouvert quelques magasins. Elle n’est pas leader sur le marché mais a prévu diverses actions, comme le lancement d’une carte de fidélisation. Comment réagissez-vous par rapport à cette arrivée ?

Nous souhaitons avoir des investisseurs qui soient aussi des partenaires stratégiques. Leur apport peut se situer au niveau commercial en vue d’accroître notre chiffre d’affaire, au niveau de la logistique pour diminuer nos coûts de revient, de l’apport de segments de compétence complémentaires, etc.

Comme je vous le disais, notre métier est avant tout un métier de proximité. La FNAC dispose de deux points de vente dans les mêmes zones où est déjà implanté notre groupe. Or le client réagit par rapport à l’offre. D’autre part, nous n’avons pas tout à fait le même type d’activité. La FNAC s’appuie uniquement sur des points de vente qui accueillent les clients. LDF dispose également de points de vente mais aussi d’une force de vente proactive vis-à-vis du client. Nos deux approches se complètent. Et, en raison du déficit de points de vente dans le pays, il reste une large place pour plusieurs acteurs dans ce domaine. Et notre principale bataille, qui doit être aussi celle de la FNAC, est de toute façon celle de l’informel : il faut multiplier les points de vente, habituer la population à se tourner vers ces derniers. Selon la dernière étude sur le sujet dont j’ai pris connaissance, les points formels (librairies, centres commerciaux, etc.) ne représentent que 35 % du marché de la librairie et de la papeterie. Donc 65 % du marché sont entre les mains de l’informel. La vente de livres et fournitures scolaires sur les trottoirs au moment de la rentrée scolaire en témoigne. Il y a donc encore beaucoup de place pour les acteurs formels et le potentiel de développement est lié à la proximité entretenue avec la clientèle.

Votre activité dans le secteur informatique ne cesse de croître, surtout dans le domaine du logiciel. Quels sont les avantages concurrentiels de Barnoin Informatique, qui fait partie de LDF Groupe, et quels sont vos projets dans ce secteur ?

Barnoin Informatique est une S2I qui développe ses propres logiciels. Nous pouvons donc vendre des logiciels prêts à l’emploi, tels que le logiciel de gestion commerciale « igescom », utilisé par Librairie de France Groupe, et disponible et paramétrable pour tous les distributeurs. Nous développons aussi des solutions personnalisées pour nos clients, tels que la CNPS, le FAFSI, le secteur emploi jeune, etc. Nous travaillons également pour des groupes comme ETISALAT et MTN. Notre avantage réside dans la faiblesse de nos coûts. Lorsque nous travaillons pour un gros opérateur de la téléphonie, nous intervenons à des coûts bien moins élevés que si le client faisait appel à des ingénieurs venus de l’étranger, et proposons pourtant le même niveau de compétence. Nos offres sont donc beaucoup plus avantageuses pour les entreprises.

Quelles solutions développez-vous précisément ?

Nous proposons des solutions pour les systèmes centraux des entreprises. Nous réalisons actuellement une mission chez un opérateur téléphonique pour optimiser leur banque de données et la rapidité de leur système. Jusqu’à récemment, ils faisaient appel à des prestataires venus de l’étranger, mais ont désormais recours à nos services pour réaliser ces types de mission. Nous sommes aussi représentants Oracle de niveau Gold, ce qui nous permet de capter la clientèle Oracle sur tout le territoire ivoirien. Nous développons des logiciels sur mesure pour certaines entreprises et administrations comme la CNPS (Caisse Nationale de Prévoyance), pour qui nous avons restructuré tout le système d’information des accidentés du travail par la digitalisation de leur relation client, la mise en place d’un système de monnaie informatisée pour le paiement en ligne de certaines prestations, etc. Nous disposons de toutes les compétences pour répondre aux divers besoins des entreprises en matière de solutions informatiques.

Quelle est votre stratégie vis-à-vis de votre clientèle?

Notre clientèle est divisée en trois grands groupes. Le premier est représenté par les entreprises et administrations. La demande étant très large, nous leur proposons une offre que l’on dit « globale », allant de la petite fourniture jusqu’au mobilier et matériel informatique, et comprenant aussi les solutions informatiques. Nous effectuons également toute la maintenance de leur mobilier et des logiciels. En fonction de la nature de la demande, nous faisons intervenir des départements différents. Notre deuxième cible est la clientèle privée. Nous proposons dans nos magasins tous les produits dont le client type peut avoir besoin dans le cadre privé : presse, ouvrages pour enfants, outils, jeux intelligents, jeux de société, objets cadeaux (maroquinerie, stylo de luxe, etc.). Notre gamme est très large. Notre troisième gros client est l’État ivoirien. Nous développons nos solutions en fonction des appels d’offre et des besoins. Nous travaillons par exemple dans le cadre des kits scolaires offerts gratuitement par l’État, que nous accompagnons dans les commandes, la conception et la distribution sur le terrain. La logistique est en effet essentielle dans ce type de projet : nous mettons à disposition des véhicules de livraison ainsi que des solutions logistiques de répartition des véhicules sur le terrain. Enfin, comme je l’évoquais, nous développons la vente en ligne, dans une perspective d’innovation pour l’avenir. Nous avons une boutique en ligne, des livreurs, un système d’appel, etc. Nous voulons ainsi répondre aux besoins spécifiques de chacun de nos clients. Aujourd’hui, un client situé à Korhogo qui commande un livre en ligne peut le recevoir en 48h à son domicile. Nous adaptons nos solutions de livraison à la situation de nos clients, grâce à un réseau de partenaires qui permet d’acheminer le produit jusqu’à sa destination finale. Un investissement a été nécessaire pour mettre en œuvre ces dispositifs de livraison, mais le client ne supporte qu’une modique part de cet investissement.

Vous avez affirmé être favorable à une participation au capital du groupe. Pouvez-vous préciser votre position ?

J’ai repris l’entreprise en 2005 et suis actuellement propriétaire de près de 95 % du capital. Une ouverture de notre capital nous permettra d’avancer, mais notre approche est moins financière que stratégique. Nous souhaitons avoir des investisseurs qui soient aussi des partenaires stratégiques. Leur apport peut se situer au niveau commercial en vue d’accroître notre chiffre d’affaire, au niveau de la logistique pour diminuer nos coûts de revient, de l’apport de segments de compétence complémentaires, etc. Nous nous intéressons à des groupes déjà actifs dans nos secteurs d’activité. J’avais approché la Fnac il y a quelques temps car je pensais qu’un partenariat pouvait être intéressant. Les discussions n’ont pas abouti car nous ne partagions pas la même optique. Notre groupe n’était pas intéressé par un système de franchises, car cela aurait généré des coûts supplémentaires et impliquait une dépendance qui ne correspondait pas à notre aspiration. Nous avions déjà une renommée que nous ne voulions pas abandonner. Notre activité se concentre sur le secteur francophone et certaines structures françaises, comme celle de Cultura, qui me semblent intéressantes. Nous pourrions également collaborer avec des chaînes de distribution à qui nous apporterions des spécificités et une connaissance du terrain. Nos points de vente peuvent aussi évoluer. J’ai par exemple été témoin de concepts originaux lors d’un séjour aux États-Unis. Une librairie proposait dans un même rayon des livres et produits cosmétiques, l’achalandage était bien fait, j’ai ramené des photos dont je pourrai m’inspirer à l’avenir. Nous sommes ouverts à de nouvelles idées et prendrons le temps de trouver le bon partenaire car nos différents secteurs d’activité sont voués à croître.

En quoi un investisseur pourrait être intéressé à vous rejoindre ?

À mes débuts, l’entreprise avait un chiffre d’affaire de 7 milliards de francs CFA. Il s’élève aujourd’hui à près de 14 milliards de francs CFA. Et je ne dois cette croissance qu’à moi-même et à une focalisation sur les compétences plutôt que sur l’aspect financier. La participation d’un groupe qui apporterait des capitaux et un savoir-faire dans un domaine précis permettrait certainement d’atteindre un taux de croissance à deux chiffres profitable à tous. Le retour sur investissement serait rapidement important.

Quels objectifs souhaitez-vous atteindre dans deux ans ?

Nous allons continuer à nous développer dans nos différents secteurs. Notre activité se concentre actuellement sur Barnoin Informatique qui est aujourd’hui une enseigne de Librairie de France Groupe. Mais Barnoin Informatique dispose de compétences extrêmement pointues et constituera peut-être une entité à part entière du groupe d’ici deux ans. La même évolution est possible pour Burotop et notre réseau de magasins. Je ne suis pas pressé et prends le temps pour l’instant d’observer l’environnement socio-politique en Côte d’Ivoire avant de prendre des décisions. Je souhaite garder l’équilibre de l’entreprise et cette volonté sera décisive dans le choix d’un partenaire. Si nous ne trouvons pas le bon investisseur, nous continuerons d’avancer seuls, sachant que notre rentabilité reste soutenue.

En quelques mots, pouvez-vous aborder votre activité dans le secteur de la vente de mobilier de bureau ?

Nous avons monté un partenariat avec une entreprise tunisienne qui se nomme Intérieurs et qui représente le leader dans la vente de mobilier de bureau en Tunisie. Nous avons ici repris la même enseigne en lançant Intérieurs Côte d’Ivoire by LDF. Nous vendons également des meubles de bureaux et nous nous approvisionnons auprès de fournisseurs de divers pays (Brésil, Portugal, Espagne, Chine et Tunisie) pour offrir le meilleur rapport qualité-prix à nos clients et apporter du professionnalisme dans un secteur qui souffre souvent d’un manque de qualité des produits. Nous allons ainsi inventer un nouveau créneau dans ce métier-là.

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